Théâ. École de Monfort 2016

Alors que chaque année, persuadée de l’intérêt de l’éducation artistique à l’école et en particulier du théâtre, je faisais mon projet dans mon coin, à chercher des textes, des artistes à rencontrer, où se produire… ; Arthur (l’animateur pédagogique de l’OCCE du Gers) me dit : « Mais tu sais que ce projet existe clé en main organisé par l’OCCE, les élèves travaillent sur les textes d’un auteur intelligemment sélectionné pour les thèmes riches abordés, ils peuvent voir une pièce de cet auteur, et un artiste vient 2 fois dans la classe pour aider à la création, puis ils montrent leur création au théâtre d’Auch… »
Hein ? Quoi ? Tout cela existe et je suis assez bête pour ne pas y participer et me faire du travail supplémentaire ? Cela en était trop je m’inscris alors à « Théâ ».
Cette année ma classe de cycle 3 était composée  d’élèves très divers allant de la grande introversion à la grande assurance pas si fondée que ça.

Nous avons commencé à lire l’Ogrelet de Suzanne Lebeau après la Toussaint et nous avons découvert le texte mis en scène par la compagnie ….avant les vacances de Noël. Les élèves étaient ravis et surpris de découvrir le texte qu’ils avaient lu, interprété sous leurs yeux. Cette première approche a donné lieu à des débats sur l’interprétation et une analyse plus fine du texte, ce qui était très intéressant sur le développement de leur sens critique.
Après Noël nous avons débuté des séances de théâtre  par des petits jeux travaillant l’écoute dans le groupe, la détente du corps,  le plaisir du jeu. J’ai pu me réjouir en  observant que les tentions du groupe s’apaisaient, que la coopération devenait plus naturelle et surprise : les élèves introvertis trouvaient leur place et un espace de communication, enfin ; les élèves très confiants découvraient leurs faiblesses et apprenaient l’humilité.

monfortPuis nous avons commencé le travail de lecture de morceaux choisis dans Petit Pierre autre pièce de Suzanne Lebeau. Nous avons lu et joué avec ce texte jusqu’à le râper (proposition faite par un élève ayant des difficultés en lecture, n’aime pas lire et qui l’a fait avec plaisir). Ce texte a permis de travailler sur l’acceptation de la différence puis sur le racisme  et d’aborder l’antisémitisme. Les élèves ont pris part à la création en sélectionnant des morceaux de textes puis dans les séances de travail où les exercices sont devenus des moments de mise en scène. Une fois de plus, leur sens critique a été éveillé. Ils ont appris à prendre la parole, donner leur avis, le justifier, à travailler ensemble, à s’écouter, se respecter, ont pris confiance en eux.

Le jour de la rencontre départementale où chaque classe propose sa création aux autres classes, les élèves ont appris le trac, le dépassement de sa peur, le respect de la peur des autres et la fierté.
Ce jour là 2 moments m’ont particulièrement  marqué :

Un élève qui ne parle pas et porte sur lui une grande tristesse, a pris la parole dans un rassemblement après la répétition dans le théâtre (1ère fois de l’année le 7 avril) pour dire, avec une grande banane sur le visage, « C’était trooop bien ! »
 Pendant la représentation un élève, qui avait eu beaucoup de conflits avec les autres pendant l'année, n’ a pas pu dire une de ses répliques. Les autres lui ont dit « Ce n’est pas grave n’en parlons plus, on a assuré. »
Est ce que je referai Théâ ? Oui c’est sûr, car oui c’est ça l’école : apprendre dans sa façon d’être au monde, se questionner sur celui-ci  tout en montrant l’importance de l’entraide et des interrelations, bref, tout ce que porte le projet Théâ.
Muriel Ducuing enseignante à Monfort (Cycle 3)